La semaine dernière, je vous ai parlé de Raymond Gurême. En évoquant ce personnage hors du commun, France Culture rappelle que « face à l’oppression et aux persécutions, les Manouches, Sintès, Kalès, Yéniches, Rroms ou Tsiganes, ont opposé des formes de résistances très diverses. »
Last week, I told you about Raymond Gurême. By evoking this unusual character, France Culture recalls that « in the face of oppression and persecution, the Manouches, Sintès, Kales, Yéniches, Rroms or Gypsies, put up very diverse forms of resistance. »
Une autre émission de France Culture du 30 octobre 2012 qui comporte aussi des interviews, dont une de Raymond Gurême, évoque le carnet anthropométrique, devenu carnet de circulation, qui semble avoir disparu depuis quelques années (2017 ?) : « Dans le sillage des nationalismes de 1870, les pays d’Europe mettent les étrangers sous surveillance. On a peur de l’ennemi, du traitre, de l’espion et bientôt aussi on a peur des “bohémiens”. Alors on commence par créer une catégorie administrative : celle des nomades, (qui ne sont ni des forains, ni des marchands ambulants), puis l’Etat va les recenser et leur imposer un carnet anthropométrique (…). Et ce n’est que très récemment, en octobre 2012 que le conseil constitutionnel invalide cette institution. »
Another program from France Culture of October 30, 2012 which also includes interviews, including one by Raymond Gurême, evokes the anthropometric notebook, which has become a circulation notebook, which seems to have disappeared for a few years (2017?): « In the wake of nationalisms from 1870, the countries of Europe put foreigners under surveillance. We are afraid of the enemy, of the traitor, of the spy and soon we are also afraid of the “gypsies”. So we start by creating an administrative category: that of nomads (who are neither fairgrounds nor street vendors), then the State will identify them and impose an anthropometric notebook (…). And it was only very recently, in October 2012, that the Constitutional Council invalidated this institution. »
Quand Raymond Gurême se fait violemment frapper par des policiers en 2014, « DAL, Droit Au Logement, dénonce cette intervention violente, sans autre motif apparent que le racisme, des représailles, ou/et un message d’intimidation. »
When Raymond Gurême was violently beaten by the police in 2014, « DAL, Droit Au Logement, Right to Housing denounces this violent intervention, with no other apparent motive than racism, reprisals, or / and a message of intimidation. »
Racisme, certainement. Alors commençons par les idées reçues. En cliquant sur ce lien, vous en trouvez une quantité, ça fait du bien de les dénoncer.
Racism, certainly. So let’s start with stereotypes. By clicking on this link, you find a quantity, it feels good to denounce them.
Pour ce qui concerne Raymond Gurême, je trouve des textes presque identiques sur « Paris-Luttes Info », « Médiapart », « Rencontres tsiganes »… J’y vais de mon petit résumé, à vous d’en lire plus ici ou là. Pour les anglophones, je vous laisse chercher des informations plus générales concernant ceux que l’on appelle « itinérants », « voyageurs », « gens du voyage »…
As far as Raymond Gurême is concerned, I find almost identical texts on « Paris-Luttes Info », « Médiapart », « Rencontres tsiganes » … I’ll go from my little summary, it’s up to you to read more here and there. For English speakers, I’ll let you look for more general information about those we call « itinerants », « travelers »…
Raymond est le fils d’un ancien combattant de 14/18 qui a été gazé. Il voit le jour dans la caravane familiale, sa famille vit d’un petit cirque et d’un cinéma ambulant, muet, à manivelle. Déjà son grand-père avait un projecteur à manivelle et un groupe électrogène. Tout petit Raymond joue un rôle dans le spectacle.
Raymond is the son of a 14/18 veteran who was gassed. He was born in the family caravan, his family lives on a small circus and a traveling, silent, hand-cranked cinema. Already his grandfather had a crank projector and a generator. Tiny Raymond plays a role in the show.
Ce cirque et ce cinéma sont bien accueillis le plus souvent. « Il n’y avait pas de barrière entre les sédentaires et les itinérants comme maintenant » dira Raymond.
This circus and this cinema are generally well received. « There was no barrier between the sedentary and the homeless like now, » Raymond said.
En octobre 1940, Raymond est alors adolescent, les gendarmes frappent à la porte à six heures du matin. Raymond, ses parents, ses 8 frères et sœurs sont contraints de tout abandonner, roulottes, chapiteau, appareils de cinéma. Ils sont enfermés et seront finalement transférés à Linas-Monthléry (tout près de Brétigny-sur-Orge). En effet, depuis 1912, les populations itinérantes sont fichées « et réparties en trois catégories: les commerçants ambulants, les forains et les « nomades », ces derniers étant les moins bien considérés et devant détenir un carnet anthropométrique. » D’une chose à l’autre la nuance entre commerçants ambulants, forains et nomades disparaît. Les déplacements sont interdits pour la durée de la guerre. Pour Raymond et sa famille, rappeler que son père est français depuis des générations, qu’il est un ancien combattant, tout cela est inutile. Au contraire, les internés « nomades » ne seront libérés qu’en 1946. Quant à sa carte d’interné politique, Raymond ne la reçoit qu’en 2009, vingt-sept ans après sa première demande.
In October 1940, Raymond was then a teenager, the gendarmes knocked on the door at six in the morning. Raymond, his parents, his 8 brothers and sisters are forced to give up everything, trailers, marquee, cinema equipment. They are locked up and will finally be transferred to Linas-Monthléry (very close to Brétigny-sur-Orge). Indeed, since 1912, itinerant populations have been recorded « and divided into three categories: itinerant traders, fairgrounds and “nomads”, the latter being the least well regarded and having to hold an anthropometric notebook. » From one thing to another the nuance between itinerant traders, fairground and nomads disappears. Travel is prohibited for the duration of the war. For Raymond and his family, remembering that his father has been French for generations, that he is a veteran, all of this is unnecessary. On the contrary, the « nomadic » internees were not released until 1946. As for his political internee card, Raymond did not receive it until 2009, twenty-seven years after his first request.
La présence des « nomades » dans la résistance est ignorée.
La mémoire des « camps d’internement des nomades » s’estompe dans l’oubli.
The presence of « nomads » in the resistance is ignored. The memory of the « nomadic internment camps » fades into oblivion.
« La tournure qu’à prise mon rapport à l’autorité et à ceux qui sont supposés incarner l’ordre, policiers et gendarmes, remonte à mon internement arbitraire de Linas-Montlhéry. Policiers et gendarmes étaient alors chargés d’appliquer des mesures indignes contre les citoyens français que nous étions. Et la majorité d’entre eux le faisaient sans moufter.
Après 1945, ni le statut de rescapé de la Grande Guerre de mon père, ni notre internement, ni mon engagement dans la Résistance n’ont été reconnus.
En revanche, ma famille et moi avons continué à être traités comme des bons à rien et des voleurs de poules par ces mêmes policiers et gendarmes. » Raymond Gurême
« The turn taken in my relationship to authority and to those who are supposed to embody order, police and gendarmes, goes back to my arbitrary internment in Linas-Montlhéry. Policemen and gendarmes were then responsible for applying unworthy measures against the French citizens that we were. And the majority of them did so without snoozing.
After 1945, neither my father’s status as a survivor of the Great War, nor our internment, nor my involvement in the Resistance was recognized.
However, my family and I continued to be treated like good-for-nothing and chicken thieves by these same police and gendarmes. » Raymond Gurême
Acrobate, Raymond s’évade, est trahi par le maire à qui il a demandé de l’aide, s’évade à nouveau, se cache dans un arbre jusqu’au petit matin alors qu’on le cherche à terre. Libre, il revient aider les siens mais il perd leur trace après un transfert. Engagé dans la résistance, il vole un camion de vivres allemand. Fait prisonnier à plusieurs reprises, il multiplie les évasions !
Acrobat, Raymond escapes, is betrayed by the mayor he has asked for help, escapes again, hides in a tree until dawn when he is searched on the ground. Free, he returns to help his family but loses their trace after a transfer. Engaged in the resistance, he steals a German food truck. Taken prisoner several times, he multiplies the escapes!
Il retrouve sa famille après de longues années et convainc ses parents de devenir ouvriers agricoles.
He reunited with his family after many years and convinced his parents to become agricultural workers.
Il s’installe dans la région de Linas-Montlhéry, face à la colline où lui et les siens ont tant souffert. Il garde le silence pendant des décennies, puis se décide enfin à parler, inquiet de l’évolution à laquelle il assiste : « Mais à quatre-vingt-cinq ans je témoigne aussi pour les générations qui viennent après moi. »
He settles in the Linas-Montlhéry region, facing the hill where he and his family suffered so much. He remains silent for decades, then finally decides to speak, worried about the evolution he is witnessing: « But at eighty-five I also bear witness for the generations that come after me. »
Avec son livre, il « brise soixante-dix ans de silence pour dénoncer les discriminations toujours vives à l’égard des nomades. »
With his book, he « breaks seventy years of silence to denounce the still strong discrimination against nomads. »
Petite biblio — Bibliography (in French !)
« Interdit aux nomades » de Raymond Gurême et Isabelle Ligner, publié en 2011 chez Calmann-Lévy.
« Brûlez-moi, comme ça je peux chanter ! » Dominique Carpentier – Dominique Idir – éditions Artriballes
« Tsiganes » Jan Yoors – éditions libretto
« Petite histoire du peuple rrom » Marcel Courthiade – éditions « le bord de l’eau »
« Je suis tsigane et je le reste : des camps de réfugiés roms jusqu’à la Sorbonne » de Anina Ciuciu — de nombreuses vidéos de Anina nous montrent cette jeune avocate qui a connu la plus grande misère. Elle a même rencontré Macron avant son élection. Il n’a pas été brillant !
— many videos of Anina show us this young lawyer who has known the greatest misery. She even met Macron before his election. He was not brilliant!
« Ces barbelés oubliés par l’histoire » de Jacques Sigot aux éditions Walada est consacré au camp d’internement des tsiganes à Montreuil-Bellay.
LIENS — LINKS
https://www.rencontrestsiganes.fr/qui-sommes-nous/
Rencontres Tsiganes est animée par des citoyens et des citoyennes, gadjé*, gitans, manouches, roms, sédentaires ou voyageurs, qui, professionnels ou militants associatifs, œuvrent ensemble pour lutter contre l’ignorance et les préjugés.
*Les gadjé, c’est vous et moi si vous ne faites pas partie de ces voyageurs.
Rencontres Tsiganes is run by citizens, gadjé *, gypsies, Roma, sedentary people or travelers, who, professionals or activists, work together to fight against ignorance and prejudice.
* The gadjé are you and me if you are not one of these travelers.
Voyageurs-citoyens
http://www.voyageurs-citoyens.fr/
Plus de 40 ans après la promulgation de la loi de 1969, les associations représentatives des Voyageurs et les associations de défense de leurs droits restent fermement déterminées à lutter pour un plein accès au droit commun et à une citoyenneté à part entière.
More than 40 years after the enactment of the 1969 law, the associations representing Travelers and the associations defending their rights remain firmly determined to fight for full access to common law and full citizenship.
Méfiance ancestrale envers l’« Autre », peur de l’inconnu ? Idées reçues ? J’espère que vous aurez appris, un peu, avec ces quelques lignes. Moi, je comprends mieux pourquoi les occupants des tiny houses ont du mal à se poser quelque part !
Ancestral mistrust of the « Other », fear of the unknown? Stereotypes ? I hope you have learned, a little, with these few lines. I understand better why the occupants of tiny houses have trouble landing somewhere!
Je ne suis pas acrobate et selon mon habitude mon enchaînement manque d’élégance, mais j’ai été touchée par cette belle histoire, alors la voici, l’amitié d’un pigeon avec le retraité qui lui a sauvé la vie. Merci à ma belle-sœur pour l’envoi !
I’m not an acrobat and in my habit my sequence lacks elegance, but I was touched by this beautiful story, so here it is, the friendship of a pigeon with the pensioner who saved her life. Thanks to my sister-in-law for sending!
Et puis j’ai écouté plusieurs fois Liliberta chanter « je suis fils » et comme j’aime beaucoup cette chanson, et qu’elle n’est pas assez écoutée, je vous invite à la découvrir. Le texte apparaît sous la vidéo.
And then I listened several times to Liliberta singing « I am a son » and since I like this song a lot, and it is not listened to enough, I invite you to check it out. The text appears below the video.
Et ici ? Après la pluie tant attendue, qui a été abondante, on a eu très froid et peur du gel, mais le jardin se porte bien. Paul reçoit des visiteurs, des jardiniers ravis de faire quelques échanges…
And here ? After the long-awaited rain, which was abundant, we were very cold and afraid of frost, but the garden is doing well. Paul receives visitors, gardeners delighted to make some exchanges …